Vie d une petite privilégiée née dans le milieu de la photographie



J’ai toujours été fière de mes ancêtres


La raison d’être de ce blog est de montrer un aperçu de l’œuvre de mon père,  grâce à ces photos collées sur carton par lui-même il y a plus 40 ans.  Je ne savais quoi faire avec. Les garder dans une boite ???

Mais aussi à « financer » le re-calcul d’une succession avec laquelle je ne suis pas d’accord. Le marché de l’art n’est peut-être pas friand de tirages collés sur carton par le photographe lui-même; par contre, sur les brocantes, le public les adore ; et je suis obligée de refuser des ventes vraiment trop basses en prix, car cela me fait mal au cœur.

Je profite de la liberté d’Internet pour retranscrire les mémoires de mon père ; c’est l’occasion de les lire et je suis convaincue qu'il aurait aimé que ses mémoires de photographe du XXème siècle soient totalement accessibles.

Je me réjouis également d’être l’auteur solitaire de ce blog qui contribue à préserver une image, si ce n’est glorieuse,  en tous les cas réelle de mon père.

églantine charbonnier
Zouzou, gardien au 16 quai d'Orléans, Paris 4ème.


Micro malentendu sur la vérité

La proposition de succession que je devais signer à sa mort en 2004 était chiffrée à hauteur de 15 000 euro (j'ai droit à 10% de la succession) pour 4 biens immobiliers, une bonne retraite de travailleur, sans compter ses photographies, dont les ventes et les droits d’exploitation de presse génèrent des revenus conséquents, car mon père, avant d’entrer dans la catégorie Artiste, était tout simplement un reporter-photographe qui voyageait sans cesse, chargé de kilos de matériel.

D’autre part,  nous sommes héritiers de la famille Natanson: les frères ont créé au XIXème siècle La Revue Blanche, un journal artistique et politique qui s’engagea à l’époque de l’affaire Dreyfus. Ils avaient pour amis des peintres devenus célèbres, les impressionnistes, Vuillard, Bonnard, Toulouse-Lautrec… Ma grand-mère n’a jamais possédé d’appartement mais a laissé les fameux tableaux à son fils unique Jean-Philippe, mon père. Il y avait plus d’un million d’euro de tableaux d’après l’évaluation faite à sa mort à l’âge de 100 ans en 2002.

Mais, toute la part artistique – les tableaux de ma grand-mère et les photos de mon père – était absente de la succession à 15 000 euro. L’explication du notaire de l’époque était que cet argent avait payé la construction d’un garage (sacré garage !)

Dans le salon de mes parents en 1974.

La Petite privilégiée

La sympathique appellation de « Petite privilégiée » m’a été balancé au Tribunal de Draguignan par l’avocat de la partie adverse, trublion d'un jour. Il est bien évident que cette micro insulte révèle simplement la pensée générale : je suis une petite privilégiée car je ne suis pas à la rue, j’ai connu des gens cultivés, j’ai été dans une école privée etc. Mais, le fond du problème est que j’ai reçu beaucoup d’amour de mon père, et ça, ce n’est pas supportable.

Zouzou et Eglantine.
Grâce à l’enquête sur ses fameux tableaux et à la procédure d’assignation en justice, j’ai eu enfin le droit de faire ré évaluer la succession. Il a été décidé que j’aurai ses objets personnels restés dans son appartement. Mais, en échange des livres, disques, vaisselle et vêtements, l’expertise de la succession serait pour moitié à mes frais (l’autre moitié est payée par les 3 de la partie adverse). Même quand on gagne, c’est cher. A ce jour: 26 000 euro de frais. Et un appartement toujours pas vidé, tel un mausolée.

Salutations pas spécialement distinguées.
Eglantine Houria Angela Charbonnier

"Dire l'épreuve, telle est la nécessité, encore impensée, à laquelle il me faut faire face, mais comment répondre à cette exigence si justement l'épreuve elle-même me réduit peu à peu au silence ?" 
Roger Laporte, SUITE, biographie, 1979.